Cultivons l’impatience !

Cultivons l’impatience !

La sagesse populaire nous rappelle à l’envi que l’impatience est mauvaise conseillère, la Bible loue la patience, … mais avons-nous réellement le temps d’attendre ?

Dans un monde qui s’accélère, clairement non !

Cette accélération d’un monde qui va déjà à 100 à l’heure, nous la vivons pleinement en ce moment en Suisse avec le lancement du MassChallenge à Renens. Ce rassemblement de talents, d’inspirateurs et de faiseurs, dans un même lieu, est une chance incroyable pour notre pays de redécouvrir le pouvoir du temps et la nécessité d’aller, plus, vite, beaucoup plus vite, et de vivre au temps du monde de demain.

C’est avec beaucoup de nostalgie que je redécouvre les écrits parlant de l’accélération du monde, qui nous rappellent ce que signifie la lenteur: une richesse de temps. Une lenteur qui correspond à un état dans lequel on dispose de suffisamment de temps pour faire ce que l’on doit faire, au temps qui nous reste après avoir tout fait. Je suis nostalgique quand on me vente l’état de lenteur, nous expliquant que c’est cet état quand il nous reste encore du temps disponible librement… En Allemand certes, Muße (qui signifie le loisir, la créativité) est le contraire de l’ennui. « La lenteur c’est le sentiment de ne pas être sous la pression d’une urgence, de ne pas être obligé de faire une chose sans en avoir le temps. ». Dans ce contexte, la richesse temporelle n’est ni l’ennui, ni une décélération contrainte, mais elle est avant tout un élément d’autonomie à la fois personnelle, et temporelle.

Le rêve de la modernité c’est que la technique nous permette d’acquérir la richesse temporelle. L’idée qui la sous-tend est que l’accélération technique nous permette de faire plus de choses par unité de temps. Et c’est bien ce que la technique a permis: les voitures roulent de plus en plus vite, nous permettant dans le même laps de temps de nous consacrer à d’autres activités.

Mais que faisons-nous de ce temps gagné ? Arrivons-nous à adapter nos rythmes et cycles de travail, d’innovations et de commercialisation, à cette nouvelle échelle temporelle qui nous est offerte ?

Le temps de diffusion d’une innovation n’a cessé de se réduire : Si cela a pris 35 ans pour que le frigo s’impose, le téléphone portable n’a pris que 15 ans et internet moins de 10 ans. Pour ce qui est des dernières innovations digitales, nous nous demandons encore comment nous pouvions vivre sans elles il y a encore quelques mois. Nous sommes tous rattrapés par cette spirale accélératrice et captés par cette économie participative que personne n’imaginait il y a quelques mois encore.

Que nous soyons complices ou victimes, rappelons-nous que d’un point de vue de la dynamique de l’innovation, l’ère du bon intel 086 est bien loin et qu’aujourd’hui, nous n’avons tout simplement plus le choix. Prenons le temps et nous nous réveillerons hors d’un système. N’agissons pas et nous serons exclus. La suisse a raté le virage de la biotech, mais nos grandes entreprises ont su rebondir en acquérant des sociétés qui les ont remises dans la course : Genentech pour Roche, Chiron pour Ciba-Geigy. Ratons le virage de la santé digitale, qui acquerra Google ou Amazon pour se remettre en selle : personne ! Hors de prix !

La lenteur n’est plus une option et la sagesse devra s’en accommoder… ou nous aurons tout le temps de méditer sur la grandeur passée de notre industrie.

Source: Invivo magazine

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