Fondation actionnaire : une véritable philosophie capitaliste

Fondation actionnaire : une véritable philosophie capitaliste

Impossible que cela vous ait échappé, le groupe Novo Nordisk est dans tous les médias, que ce soit pour son chiffre d’affaires d’environ 8 milliards de francs en 2022 avec le seul médicament Ozempic (contre l’obésité) pour sa valorisation en bourse, qui a gagné plus de 230 % au cours des 5 dernières années, ou pour avoir engagé la rappeuse et actrice américaine Queen Latifah pour sa campagne «It’s bigger than me», qui braque les projecteurs sur l’obésité et vise à aider les personnes à se sentir mieux grâce à des médicaments pour la perte de poids … ce qui alimente le battage médiatique, la présence incontournable de Novo Nordisk sur les réseaux sociaux … et ses ventes.

Heidi News prépare un livre attendu sur l’émergence des GLP-1, la substance active qui alimente les milliards du business de la perte de poids. Je me réjouis de le lire, mais mon propos est ailleurs : le succès de Novo Nordisk braque les projecteurs sur la place du Danemark dans le domaine de la santé et du pharma. Petit pays de moins de 6 millions d’habitants, il se distingue par son dynamisme. En 2022, n’a-t-il pas ravi à la Suisse sa place de N°1 au classement mondial de la compétitivité, place qu’il occupe pour la première fois en 34 ans d’histoire du classement ? Le Danemark obtient d’excellents résultats dans le facteur « efficacité des entreprises » (1ère place), une appréciation soulignée par le professeur Arturo Bris, directeur du Centre de la compétitivité mondiale qui relève le fait que « le Danemark est le pays le plus avancé sur le plan numérique dans le monde. Il occupe désormais la première place grâce à de bonnes politiques, aux avantages que lui confère son statut de pays européen, à une orientation claire vers la durabilité et à l’impulsion de son secteur privé agile”. Particularité du Danemark, sa densité de « fondations actionnaires ».

Une fondation actionnaire est une fondation qui détient tout ou partie d’une société commerciale. Elle a de ce fait une double mission : philanthropique, en soutenant des projets d’intérêt général (notamment grâce aux dividendes qu’elle perçoit) et économique, en jouant son rôle d’actionnaire. Ce modèle de participation permettant donc de faire converger les intérêts économiques et philanthropiques, bien qu’il soit peu connu, est une typicité bien européenne née de l’essor industriel du début du vingtième siècle. Dans les pays nordiques, elle s’est établie comme une véritable philosophie capitaliste. Au Danemark, plus de 50 % des entreprises cotées appartiennent à des fondations, soit pas moins de 1 300 fondations actionnaires dont, pour les plus connues, Carlsberg, Novo Nordisk, Lundbeck, Velux, Maersk, ou Danfoss. Mais l’Allemagne n’est pas en reste avec près de 1000 fondations détentrices entre autres de Bosch, Bertelsmann, Staedtler, Aldi, LIDL, Zeiss ou Playmobil. Et la Suisse ? Le point commun entre Rolex, Victorinox, Lindt & Sprüngli et Le Temps – ces entreprises qui font la renommée de notre pays à travers le monde- est qu’elles sont toutes détenues, en tout ou partie, par… des fondations !

Actionnaires stables et durables, les fondations actionnaires protègent les valeurs et les intérêts des entreprises en les inscrivant dans une perspective de long terme. Actionnaires solidaires, elles soutiennent des causes philanthropiques grâce aux dividendes qu’elles perçoivent. Un modèle vertueux de protection, de gouvernance et de transmission des entreprises choisi par de grands noms, qui, espérons-le sauront inspirer des fondateurs dans leur ambition de construire l’économie de demain, au service du bien commun.

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