[Editorial] Du “Game” au “Play” – Une évolution des dynamiques humaines

[Editorial] Du “Game” au “Play” – Une évolution des dynamiques humaines

Autrefois, le “game” était une célébration collective. Ce mot, tiré de l’ancien anglais gamen, évoquait un jeu au sens large : une activité où les règles servaient de cadre à un échange, à une création commune. Dans ce “game”, l’objectif n’était pas seulement de gagner ou de perdre, mais de participer à une expérience enrichissante, où les participants ressortaient grandis, quel que soit le résultat. Le “game” incarnait une quête d’apprentissage mutuel, de découverte de soi et des autres.

Aujourd’hui, le “play” a pris le dessus. En apparence inoffensif, ce terme est devenu synonyme d’une dynamique centrée sur la performance individuelle et la victoire. Jouer, dans cette logique, n’est plus un acte de partage, mais une stratégie tournée vers le dépassement de l’autre. Le “play”, dans sa forme actuelle, alimente une mentalité compétitive où l’enjeu n’est pas tant de grandir ensemble que de s’imposer comme vainqueur, souvent au détriment des autres.

Un basculement de sens aux implications profondes

Ce glissement du “game” au “play” traduit une évolution des valeurs de nos sociétés. Le “play” valorise l’action immédiate, l’efficacité et la quête de résultats mesurables. Ce n’est pas un hasard si l’ère numérique, avec ses métriques de likes, de scores et de classements, renforce cette logique. Dans le “play”, les règles sont des outils à exploiter pour triompher, non des piliers d’une interaction équilibrée.

En revanche, le “game” repose sur une vision plus large et inclusive. Il invite à réfléchir sur le cadre, à respecter l’autre et à chercher un enrichissement réciproque. Dans le “game”, chaque participant devient un acteur d’une dynamique collective, contribuant à une aventure plus vaste que la simple victoire.

Des conséquences visibles

Ce basculement se manifeste dans de nombreux domaines :

  • En entreprise, où l’accent est mis sur la compétition interne, au détriment de la coopération.
  • Dans les relations sociales, où les interactions sont parfois des confrontations déguisées.
  • Dans l’éducation, où la pression des performances individuelles occulte l’apprentissage collaboratif.

Revenir à l’essence du “game”

Loin de rejeter le “play”, nous devons le rééquilibrer avec l’esprit du “game”. Car si le “play” alimente l’énergie et l’envie de progresser, il doit être ancré dans les principes du “game”, où l’enjeu dépasse le seul triomphe personnel. Cela signifie retrouver une vision collective, redonner du sens aux règles comme instruments d’équité, et prioriser l’enrichissement mutuel sur la victoire à tout prix.

Le “game” n’est pas un concept désuet. Il est la clé pour construire des sociétés où le progrès individuel sert un bien commun. Alors, jouons, certes, mais jouons ensemble pour que chacun, au-delà du résultat, puisse dire : “J’ai appris, j’ai grandi, j’ai contribué.”

2 Comments

  1. benoit bediou - January 30, 2025

    Je me questionne… Ce changement n’est-il pas le simpel reflet d’une modification plus profonde de la société et des valeurs humaines, morales, etc. ? Et que l’on observe à tous les niveaux, y compris politique (elections américaines), formation et éducation (de plus en plus compétitrif et orienté performance), etc. La transition du game vers le play n’est peut-être qu’un des multiples signes (ou une victime) de ce chagement plus global…

  2. Quentin Ladetto - January 31, 2025

    Il y avait également un aspect “ludique” qui accompagnait ce moment de partage et bien souvent le jeu était “gratuit”, au moins dans ce contexte.
    Actuellement, il faut tout de même un équipement passablement sophistiqué pour participer au “play” ce qui pose une barrière et crée plus “clan” que des “communauté”.

    Et la grande leçon également du jeu, est que celui-ci permet d’apprendre à perdre et à s’y préparer… pour mieux apprendre de ses erreur et ne pas les répéter à la partie suivante !

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