Il y a une année, nous nous demandions si « ce » vague virus allait nous toucher et comment il nous impacterait. Nous nous demandions s’il arriverait jusqu’à nous, mais nous n’imaginions ce que nous vivrions les mois suivants. Quand nous réécoutons certains propos plus que rassurants de la part d’officiels de haut rang, nous nous demandons s’il s’agissait, à l’époque, d’intox, de naïveté ou d’excès d’optimisme. La suite, nous la connaissons tous. Le 11 mars l’OMS qualifie la situation de « pandémie », le 2 avril quatre milliards de personnes confinées, aujourd’hui nous sommes à plus de 100 millions de cas. Dissémination rapide ? Éclair ? … et pourtant ce n’est rien au vu de la propagation virale de l’information.
En 2012 apparaît une vidéo qualifiée de la « plus virale de l’histoire » avec plus de 100 millions de vues en seulement six jours. Il s’agit du film Kony 2012, un documentaire de 30 minutes sur Joseph Kony, chef de guerre ougandais, fondateur de l’Armée de résistance du Seigneur. Une ONG américaine est derrière la réalisation et la diffusion de cette vidéo, déterminée à dénoncer les crimes de Kony et à le faire arrêter. La vidéo publiée sur YouTube est relayée par des millions d’internautes grâce à Facebook et Twitter. La vidéo est partagée par des célébrités très suivies sur Twitter.
La viralité, c’est cela : 100 millions de vues en 6 jours pour une vidéo.
Quand nous parlons d’un monde qui s’est rétréci à la taille d’un village, on suppose encore une certaine distance. Aujourd’hui, nous avons tous été engloutis par nos smartphones au point de devenir les VICTIMES et les ACTEURS consentants de ces réseaux ultra-centralisés.
VICTIME – Le mot viralité nous renvoie à une image négative de quelque chose d’invisible qui s’immisce et cause du mal : que l’on pense au virus informatique, à la pandémie qui sévit. Cette viralité repose ainsi entièrement sur un système de recommandations et s’apparente au principe du bouche-à-oreille, réactualisé de manière virtuelle dans le cyberespace. Cette viralité, intrinsèquement mauvaise ? Non sur la forme, mais dangereuse sur le fond, car ces réseaux peuvent propager les messages les plus radicaux sans régulation établie. Le récent épisode ayant touché le Président des États-Unis nous montre une fois de plus notre attentisme coupable, notre incapacité à anticiper de vrais dilemmes. Qui a l’autorité de juger si un compte de réseau social doit être interrompu ou pas ? Le réseau social qui est l’outil de la diffusion ? Une cour de justice ? Le monde politique ? Nous ne savons aborder la question des Fake News car comment déterminer objectivement ce qui est « Fake » et pour reprendre les termes de Miret Zaki, ancienne rédactrice en chef de Bilan qui nous avait fait l’honneur de partager sa vision dans le cadre du Challenge Fact & Fake Inartis, « La sélection de contenu, aussi bienveillante soit-elle, peut s’avérer pire que la censure elle-même car elle casse notre libre arbitre et choisit, pour nous ».
ACTEUR – Le constat est saisissant : 7 millions de vues pour les dernières vidéos du Youtubeur « Norman », 2,8 millions de vues pour le documentaire conspirationniste « Hold-Up » sur Internet, 733 vues pour une des dernières vidéos « technologiques » du World Economic Forum, 316 vues pour un documentaire didactique EPFL à destination des enfants… Comment justifier une telle différence pour du contenu 100% digital ? La qualité du tournage et celle du produit final n’expliquent rien. Et encore moins la qualité du contenu. Si hier l’influence pouvait être drainée par des personnalités et des véhicules qualitatifs reconnus, des « références », ce sont aujourd’hui les nombres, et les nombres seuls, qui plaident en faveur de la diffusion du contenu sur la planète. Qui maîtrise les nombres, maîtrise la dissémination du Savoir et finalement maîtrise l’opinion de la population.
Inquiétée par ce phénomène d’inadéquation entre la valeur des contenus et la puissance de diffusion de ces derniers, notamment pour ce qui est de la communication des start-up qu’elle accompagne et de leur capacité à se faire reconnaître, la Fondation Inartis lancera en septembre prochain son « Growth Hacking Lab » : l’outil de reconquête de l’univers des media digitaux.
A défaut de pouvoir enrayer le phénomène des Fake News, occupez le terrain médiatique, apprenez à gérer, diffuser, propager vos connaissances, vos savoir-faire et en particulier vos contenus scientifiques. Apprenez à contrôler la viralité !